mardi 4 janvier 2011

Le pouce du skieur

Dès la mi-novembre, nous sommes nombreux à la fenêtre tous les matins à guetter les premiers flocons de neige nous annonçant que la saison de ski n’est enfin plus bien loin. Mais le moment venu de nous diriger vers les pentes, bâtons de ski sous le bras, il vaut la peine de se souvenir qu’une bonne saison de ski en est une sans blessure.
En matière de ski, bien qu’on entende surtout parler de blessures au tronc inférieur, les blessures au pouce représentent environ 5 à 10 % des blessures totales. (Foye, 2010) Et si celles-ci ne sont pas traitées correctement, elles peuvent occasionner de graves conséquences. Le « pouce du skieur » se produit lorsque le pouce est forcé en direction opposée de la main, endommageant le ligament latéral cubital reliant les os à la base du pouce. Le ligament peut se déchirer en totalité ou en partie et, parfois, cette déchirure peut arracher un morceau d’os, résultant en une cassure mineure qu’on appelle fracture par avulsion. Le simple fait de tomber sur une main tendue peut causer ce type de blessure, mais celle-ci risque davantage de se produire lorsque l’on fait une chute en tenant un bâton de ski. C’est la raison pour laquelle on associe cette blessure au ski.

Le « pouce du skieur » se manifeste généralement par une douleur à la base du pouce qui s’accentue avec tout mouvement et présente une enflure -- voire une ecchymose dans certains cas -- dans la région, une difficulté à agripper des objets en utilisant le pouce et une douleur si on touche le long de l’intérieur du pouce. Si vous ressentez certains de ces symptômes, évitez l’attente au bureau du médecin et prenez un rendez-vous d’urgence avec un physiothérapeute. En vous posant certaines questions sur ce qui est arrivé au moment de la blessure, en examinant la région blessée et en effectuant certains tests, votre physio est en mesure de confirmer un diagnostic et de vous aider à établir un plan de traitement.

Si on redoute une cassure, on vous enverra faire prendre des radiographies. Si le physiothérapeute soupçonne que le ligament est complètement déchiré, il vous conseillera de consulter un médecin orthopédiste, qui vous enverra passer d’autres examens sous forme d’imagerie par résonance magnétique ou d’ultrason pour une image exacte de la blessure. Dans les cas de cassure complexe ou de déchirure complète du ligament, la chirurgie s’avère essentielle pour réparer la lésion. Si le ligament est endommagé, mais toujours attaché (rupture partielle), ou s’il y a un petit morceau d’os cassé (mais qui est demeuré en place), on peut faire un traitement conservateur, c’est-à-dire, sans chirurgie. Dans un tel cas, on immobilisera votre pouce à l’aide d’un appareil orthopédique pendant environ 4 semaines. Votre physiothérapeute vous fournira un traitement pour accélérer la guérison, atténuer la douleur, ainsi qu’aider la mobilité et la force de votre pouce. On s’assurera ensuite que vous êtes entièrement guéri avant de faire à nouveau du ski, afin d’éviter que la blessure ne réapparaisse. Il ne faut pas se leurrer : le pouce est peut-être une région menue, mais il est essentiel qu’il conserve le meilleur état possible, non seulement pour le ski, mais également pour un grand nombre d’activités. Des études ont prouvé que les blessures qui auraient nécessité une chirurgie -- mais dont la chirurgie n’a malheureusement pas eu lieu -- peuvent mener à une invalidité permanente de l’articulation (Heim, 1999). Ne courez donc pas ce risque en ignorant vos symptômes.

C’est bon de savoir ce qu’il faut faire en cas de blessure, mais de savoir comment les prévenir peut vous éviter bien des problèmes. On devrait habituer les skieurs à laisser tomber leurs bâtons avant d’atterrir au sol lors d’une chute. Ce simple réflexe diminuerait considérablement les chances de souffrir d’un « pouce du skieur ». De plus, les bâtons les plus sécuritaires sont ceux avec des poignées moulées pour la main, sans aucune restreinte (comme une sangle).

Pour terminer, si vous effectuez un retour au sport suite à une blessure au pouce, un bandage de l’articulation ou un appareil orthopédique protecteur peut déterminer si vous allez faire du ski pour le reste de la saison…ou devrez attendre à l’an prochain.

Bonne chance cette saison !

Heather Little, physiothérapeute, Action Sport Physio West Island


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Sources:
Foye, P., « Skier's Thumb », eMedicine [en ligne]. Article révisé le 31 août 2010. (Cité le 8 déc. 2010).


Heim, D., « The Skier's Thumb ». Acta Orthopaedica Belgica. Déc. 1999; 65(4):440-6.